« Ce métier, c’est une adaptation constante »

Les cadres de santé ont un rôle crucial au sein de l’Institut Camille Miret. Nous avons rencontré Noura Zouhri, cadre de santé dans l’Unité de Psychopathologie des Conduites Addictives (UPCA) , située à Leyme, pour en savoir plus sur son métier. (1ère Partie)

Vous êtes cadre de santé ici, ça consiste en quoi exactement  ?

Mon métier consiste en la coordination du service, avec les équipes soignantes, les autres services de l’hôpital, ou même la coordination avec les partenaires.

Cela va de l’appel du patient qui a eu sa visite de préadmission, à l’information sur le déroulé de son hospitalisation, en passant par l’accueil dans le service. Cela consiste aussi à coordonner toutes les actions qui vont évoluer autour du patient durant son hospitalisation.

Il s’agit également d’accompagner les équipes dans la prise en charge, que ce soit en termes de présence, au travers des plannings, en termes de sécurité, de règles, et de bonnes pratiques.

Mon rôle consiste aussi à orienter les salariés vers les formations les plus adaptées et qui répondent à leurs besoins et ce, dans la mesure du possible.

Avant de devenir cadre de santé, j’exerçais le métier d’infirmière.

Et comment passe-t-on d’infirmière à cadre de santé ?

En ce qui concerne mon parcours, je suis lotoise, de Montcuq-en-Quercy-Blanc plus précisément. J’ai fait mes études à Cahors puis à l’Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) de Figeac. C’est un parcours purement lotois.

Durant la formation, nous devons effectuer des stages. Mon premier stage, je l’ai effectué en psychiatrie. C’était en addictologie, donc dans ce service. Ce service a donc été mon premier lien avec la psychiatrie. C’est ce stage qui m’a donné goût à ce métier. Par la suite, j’ai fait un second stage en pédopsychiatrie, au sein du service adolescents de l’ICM, Elan’Go, et mon stage pré-professionnel au sein du service enfants, Hopti’Mom.

J’ai pu bénéficier d’une bourse d’études en deuxième année lors de mon stage à Elan’Go. Cette bourse m’a permis de terminer mes études dans de meilleures conditions et de me projeter avec sécurité vers un CDI à la sortie de mon parcours d’étudiante.

J’ai pris mon poste d’infirmière à Elan’Go à  Leyme de 2016 à 2022. J’ai ensuite obtenu le poste de cadre, dans le cadre d’une promotion interne.

« Je me définis comme « bébé » de l’Institut Camille Miret, j’y suis très attachée !

Pourquoi ce choix ?

J’ai toujours souhaité agir au sein même de l’institution. J’avais envie de légitimer certaines choses dont je savais que je pouvais les mettre en place et avoir un peu plus de pouvoir d’action pour certaines choses.

Je souhaitais surtout avoir un regard sur la globalité de l’institution pour bien comprendre ce qui s’y passait. Ce choix me permettait d’avoir une vision un peu plus générale du fonctionnement du Centre Hospitalier Jean-Pierre Falret afin de comprendre aussi certaines décisions qui pouvaient être prises.

Devenir cadre, me permettait également de devenir actrice au sein même d’une structure et de pouvoir faire part de mon point de vue. Depuis le début de mes études, je me projetais déjà sur un poste d’encadrement.

J’’ai été déléguée pendant mes trois années d’études, je le suis encore actuellement lors de ma formation en Master (NDLR Après avoir passé sa soutenance le 2 septembre, les équipes sont heureux d’apprendre que Noura est diplômée en tant que cadre depuis ce lundi 23 septembre)

On n’est alors pas du tout sur les mêmes missions, même si cela rejoint tout ce qui touche à l’organisation, la logistique et la coordination.

Justement, au niveau des missions, y-a-t-il une journée type ?

Il n’y a pas vraiment de journée type. Ce sont plutôt des missions hebdomadaires. Je sais que dans la semaine j’aurai certaines tâches à accomplir, mais ce qui me plaît beaucoup dans ce métier, c’est justement l’imprévu, le fait qu’il n’y ait pas de routine.

Les patients sont différents, donc ils ne vont pas avoir les mêmes demandes. Pour les soignants c’est la même chose. Il y a la gestion de l’urgence également, que ce soit pour les patients ou pour les équipes.

Par exemple, lorsqu’un patient va devoir partir rapidement parce qu’il décompense sur le plan somatique, il faut lui trouver rapidement une ambulance pour qu’il puisse partir. Lorsqu’un soignant ne peut pas venir à la dernière minute parce qu’il est malade ou qu’il a un empêchement, il faut réorganiser le service, sécuriser la prise en charge des patients et la sécurité des soignants.

Être cadre de santé, c’est une adaptation constante. 

Tout cela se fait en étroite collaboration avec le psychiatre aussi (Dr Antonin Corre). Notre binôme médecin-cadre fonctionne d’ailleurs plutôt bien.

Vous avez 30 ans, est-ce difficile de s’intégrer dans ce milieu quand on est relativement jeune ?

En toute honnêteté, en ce qui concerne la prise de poste, j’avais quelques appréhensions. Comme j’ai confiance en mes compétences et que je pense que ce n’est pas une question d’âge, mais plutôt une question de posture, ces quelques appréhensions ont vite été dissipées. De plus, généralement, on me donne plus que mon âge… Pour moi, ce sont des compétences que l’on met à contribution et donc l’âge n’a finalement pas d’importance.

On peut être un très bon jeune cadre comme un très mauvais jeune cadre. Pour moi, l’âge n’a pas eu d’impact. C’est plus une question générationnelle, avec une nouvelle vision des choses. Ce qui m’intéresse c’est aussi ma capacité à apporter mon point de vue sur cette nouvelle génération qui arrive, qui n’a pas les mêmes attentes, ni les mêmes besoins.

Nous avons ces échanges avec mon équipe y compris en ce qui concerne la différence sur nos points de vue. Je trouve cela enrichissant et productif.

En ce qui me concerne, j’apprends beaucoup de mes collègues cadres et de mon encadrement et je pense qu’eux-mêmes apprennent aussi grâce à ma vision des choses plutôt nouvelle.

En ce qui concerne les soignants plus particulièrement, certains sont plus attachés à tout ce qui va être numérique. D’autres ne vont pas avoir les mêmes besoins, ni les mêmes attentes. Cela peut être en fonction de leur âge aussi.

Cette génération n’a peut-être pas non plus les mêmes valeurs « travail » que les précédentes.

En tous les cas, ils ne n’abordent pas le travail de la même manière. Leur approche n’est pas plus mal. Les choses évoluent et il est important que l’on comprenne cette évolution et que l’on évolue avec cette nouvelle génération.

 

Comment cette perception du travail évolue-t-elle ?

Les nouvelles générations sont plus ciblées sur la qualité de vie.

Dans les générations précédentes, quand les gens rentraient dans un établissement, ils étaient partis pour y faire l’intégralité de leur carrière.

Dans cet établissement en particulier, les gens s’ancraient au sein même d’un territoire. Leur souhait était de s’y installer sur du long terme.

Désormais nous faisons face à des profils de soignants qui ont envie de découvrir plein de choses, qui restent un certain temps sur un établissement, mais qui n’ont plus cette crainte de bouger, d’aller découvrir ce qui se passe ailleurs, de compléter leurs compétences aussi.

Nous devons faire face à plus de turnover sur de nombreux métiers, et en particulier chez les soignants. Cette façon de voir les choses et d’appréhender son métier a un véritable impact en ce qui concerne les ressources humaines.

Personnellement, je trouve ce changement générationnel très intéressant. Il faut simplement l’entendre, savoir s’adapter et adapter nos organisations.